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M. Jean Daubigny

Préfet de la Région d’Île-de-France, Préfet de Paris

«Le 1er janvier 2016, la Métropole du Grand Paris sera au rendez-vous de l’histoire »

 

Jean Daubigny, Préfet de la Région d’Île-de-France, Préfet de Paris

La loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM) acte la création de la Métropole du Grand Paris au 1er janvier 2016.

Pouvez-vous évoquer les principaux atouts et faiblesses du territoire francilien en termes économiques, sociaux et environnementaux ?

Avec près de 12 millions d’habitants, un PIB de 612 milliards d’euros et près de 6 millions d’emplois, qui en font la première région économique d’Europe, l’Île-de-France est dans le peloton de tête des grandes métropoles mondiales.

Avec le Grand Paris, il s’agit de contribuer à l’accroissement du rayonnement de la région, en répondant aux défis actuels. Il s’agit de renforcer l’Île-de-France comme territoire de pointe où il fait bon vivre, travailler, résider, se déplacer. C’est aussi affirmer un intérêt soutenu pour sa jeunesse et l’innovation, capable de proposer un projet à chacun dans une société plus solidaire.

Deux enjeux essentiels sont garants de la réussite de ce projet à l’échelle régionale. Le premier est dans sa réalisation : transformer un projet de transport (le Grand Paris Express) en liant ce projet à l’organisation générale de la ville (Métropole du Grand Paris). Comme l’a dit le Premier ministre, il s’agit de passer d’un projet d’infrastructure à un projet d’aménagement global.

Le second enjeu concerne la gouvernance avec la création au 1er janvier 2016 de la Métropole du Grand Paris, et de vastes inter-communalités en grande couronne. Ce projet nécessite l’implication des acteurs concernés à tous les échelons, leur collaboration proche, active et concrète.

Aujourd’hui, concrétiser ce projet, c’est avancer sur le Grand Paris Express, porter les projets d’activités, notamment de recherche et d’innovation, débloquer la situation du logement, valoriser encore l’image d’excellence, particulièrement culturelle, penser un nouveau modèle de ville solidaire et parvenir à une nouvelle gouvernance pour porter cet ensemble.

Dès lors, quelle place doit occuper la Métropole du Grand Paris dans la région Île-de-France ?

La Métropole du Grand Paris constituera le cœur de la région Île-de-France. Son poids démographique et économique lui donnera naturellement un rôle très important dans le développement de la région. Nous construisons un territoire qui, avec la capitale au centre, le positionne plus que jamais comme un acteur mondial dans la compétition internationale avec la création de la Métropole du Grand Paris.

Nous construisons autour de la Métropole des territoires disposant d’une taille importante et d’un réel potentiel (Roissy, plateau de Saclay, Eurodisney…) complémentaire à celui de la Métropole. Elle ne concentrera pas toutes les richesses, et les territoires qui l’entourent lui seront indispensables pour son propre rayonnement et développement. Chaque territoire joue un rôle dans le développement métropolitain.

La Métropole du Grand Paris intégrera cet objectif qui consiste à vivre en parfaite complémentarité avec les autres territoires de l’Île-de-France. Ils s’irriguent mutuellement pour faire la richesse de la région capitale.

Remise du certificat de qualification professionnelle (2 promotion de cuisine mode d’emploi(s), le vendredi 1er janvier 2013) par Jean Daubigny en présence de Frédérique Calandra, Maire du 20e arrondissement et Thierry Marx, Chef étoilé.

Quels efforts sont déployés afin d’ éviter l’ étalement urbain et ainsi conserver la vocation rurale et forestière de l’Île-de-France (région couverte aux trois quarts de terres agricoles et de forêt ; source : saveursparisidf.com) ?

L’Île-de-France est une grande région agricole : céréales, bette- raves à sucre, maraîchage, élevage (le Brie!). Elle garde une grande couverture forestière. La pression foncière qui caractérise l’Île-de-France conduit les acteurs institutionnels (État, Région, Safer) à faire preuve d’une vigilance particulière pour préserver la dimension rurale et naturelle de la région capitale (48% de la superficie francilienne) et forestière (23% de la superficie) face à la tentation de consommation des terres agricoles et de mitage des espaces ouverts dans les communes.

Le Schéma directeur de la région Île-de-France (SDRIF) document opposable issu de vastes concertations, pose des protections claires et efficaces contre une consommation inconséquente d’espaces
ruraux.

État et Région soutiennent l’action de la Safer Île-de-France, qui, au travers de sa connaissance fine de terrain, de son analyse régionale, des outils fonciers dont elle dispose et de ses capacités de médiation territoriale, contribue directement à l’aménagement des grands projets structurant la métropole francilienne, inscrits dans un développement durable du territoire.

La densification du logement en banlieue est une politique qui concilie expansion démographique et respect de l’espace rural.

En juin 2013, dans le cadre du dossier des Cahiers d’administration consacré aux cinquante ans du Conseil économique social et environnemental régional d’Île-de- France (CESER IDF), vous souligniez « qu’en 2012 les services de l’État à Paris et en Île-de-France ont enregistré 49 311 dossiers DALO(1) et DAHO(2) (dont 11 899 pour Paris) ». Quel est aujourd’hui le bilan en la matière, l’objectif de construction de 70 000 logements est-il toujours d’actualité et quel est le rôle du préfet dans cette dynamique ?

L’Île-de-France, région la plus peuplée du pays et à l’importante croissance démographique, requiert un effort particulier. 70000 permis de construire ont été délivrés en 2012, 60000 en 2013. La construction stagne depuis plusieurs années en moyenne entre 42000 et 43000 logements par an. Elle est largement soutenue par la création de nouveaux logements sociaux (25 000 en 2013).

En Île-de-France, 550000 personnes demandent un logement social, dont environ un quart vivent déjà en HLM et 45 700 de ces demandeurs ont été reconnus prioritaires et urgents au titre du droit au logement opposable (DALO).

Un premier comité interministériel (CIM), présidé par le Premier ministre, a été réuni le 13 octobre 2014 et a décidé la mise en place de nouveaux outils destinés à dépasser les blocages pour atteindre l’objectif de 70 000 logements par an.

Des territoires à fort potentiel ont été identifiés : ils feront l’objet d’ une intervention forte de l’État, grâce à des outils d’aménagement rénovés et modernisés, et la mise en place d’une nouvelle génération d’opérations d’intérêt national (OIN) dite multisites. Pour soutenir cet effort, un dispositif d’aide aux maires bâtisseurs est mis en place.

Des mesures ont également été prises pour accompagner la lutte contre l’habitat indigne sur des territoires prioritaires et sécuriser le redressement de copropriétés dégradées, avec notamment la création d’une OIN de re-qualification des copropriétés dégradées à Clichy-sous-Bois.

Mon rôle est de proposer des mesures et de conduire la mise en œuvre des décisions du CIM et de veiller à l’application des dispositions législatives qui favorisent le développement de l’offre de logements sur le territoire régional. Les services régionaux, et notamment la Direction régionale et interdépartementale de l’éhébergement et du logement (DRIHL), mettent en application :

  • l’accélération de la construction de logements, notamment sociaux, formalisée par la signature d’un pacte engageant l’État et l’ensemble des professionnels (promoteurs, bailleurs, aménageurs, etc.) ;
  • l’application effective des nouvelles dispositions créées par la loi du 18 janvier 2013, c’est-à-dire le passage de 20 % à 25 % des obligations de construction de logements sociaux par commune et le quintuplement des pénalités ;
  • le développement de l’offre de logements intermédiaires, favorisée par la création d’un statut spécifique et qui bénéficie déjà, via la loi de finances 2014, d’un taux de TVA à 10% ;
  • l’amélioration de la performance environnementale des constructions ;
  • la réhabilitation du parc existant, dans le cadre du programme national de renouvellement urbain, et aussi par l’aide aux travaux de rénovation énergétique et le renforcement des moyens pour résorber l’habitat indigne et les copropriétés dégradées ;
  • le développement d’une offre pour les plus démunis : dans ce domaine, l’action porte notamment sur la création de logements accompagnés et sur une meilleure répartition des capacités d’hébergement sur l’ensemble du territoire régional.

 

L’action sur le foncier est la base de ces priorités dans le prolongement de la mobilisation lancée en 2013 avec la libération d’emprises foncières mutables, et les listes des terrains soumis à la décote publiées.

Nous travaillons également pour favoriser le recours aux dispositions relatives à la densification en milieu urbain et à la transformation de bureaux en logements.

Je suis très attentif aux problématiques d’accès au logement et d’insertion par le logement. Nous avons renforcé nos dispositifs de relogement des publics prioritaires, et je suis heureux de constater que le nombre de ménages DALO relogés est supérieur au nombre de ménages nouvellement reconnus prioritaires.

Je veille naturellement, dans la programmation des logements sociaux, à la présence de programmes destinés aux personnes aux ressources modestes.

Des efforts considérables sont déployés pour faire accéder au logement des ménages sortant d’hébergement d’urgence, notamment dans le cadre du dispositif d’intermédiation locative Solibail, dans lequel sont aujourd’hui inscrits plus de 3 300 appartements et pour lequel nous allons bientôt relancer un appel à projets.

Les nouveaux outils de gouvernance qui ont été mis en place en Île-de-France sont les instruments de réussite de ces objectifs. Le Comité régional de l’habitat et de l’hébergement, que je copré- side avec le président du Conseil régional, a tenu sa première séance plénière le 12 décembre 2014. Ce Comité a la responsabilité de coordonner les politiques de l’habitat et de l’hébergement sur le territoire régional, d’en définir les objectifs, de répartir l’effort à conduire entre les territoires et de suivre l’application des actions engagées.

Quelles sont les avancées en matière de contrats de développement territorial (CDT ?)

Les contrats de développement territorial ont été instaurés par la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris ; ils sont conçus comme des outils de construction des territoires de projets du Grand Paris et articulés autour du futur réseau de transport. Ils constituent des espaces de dialogue et d’élaboration de projets entre collectivités, l’État et les partenaires concernés.

Sur l’ensemble des vingt projets de CDT initiés depuis 2010, quatorze sont validés et entrés dans une phase opérationnelle.

Le 31 décembre 2014 a marqué le terme du délai légal de mise en enquête publique des CDT existants. Pour capitaliser le travail engagé sur des CDT non aboutis, accélérer encore davantage la réalisation de ces projets de territoire et faciliter leur création, une nouvelle formule a été créée : le Contrat de développement d’ intérêt territorial (CDIT). Grâce à une procédure simplifiée, les démarches sont facilitées et accélérées. L’État s’engage ainsi aux côtés des collectivités dans la concrétisation du Grand Paris pour les entreprises et les citoyens.

Une seule illustration, mais si forte : sur les territoires des CDT se situe 40 % du potentiel des 70 000 logements annuels, c’est dire leur importance, et la volonté de l’État.

Visite d’une chaufferie bois (2ème plus importante chaufferie de ce type en IDF – exemplaire car elle alimente 40 000 logements sur le secteur) à Stains – 93 – par M. Daubigny et Huchon dans le cadre de l’adoption le 14 décembre 2012 du schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie (SRCAE).

Enfin, d’ores et déjà, considérez- vous que la Métropole du Grand Paris sera, le 1er janvier 2016, au rendez-vous d’une nouvelle étape de son rayonnement ?

Le 1er janvier 2016, la Métropole du Grand Paris sera au rendez-vous de l’histoire. Partout dans le monde, la globalisation de l’économie s’est accompagnée de la constitution de grandes métropoles ayant vocation à dynamiser le développement économique et social. La France a la chance de disposer avec Paris d’une métropole de taille mondiale et d’une image formidable, d’activités de pointe, de culture et de tourisme. Mais la concurrence est réelle. La rapidité des flux, notamment financiers, nous oblige à renforcer la place de Paris dans cette compétition. La surface limitée de la capitale devenait un frein à son développement. La création de la Métropole du Grand Paris redonne une dimension comparable aux autres grandes métropoles. Le rôle de la Métropole du Grand Paris est double : donner à notre capitale les moyens de jouer son rôle international, mais aussi de locomotive française et européenne, dans la globalisation de l’économie, et renforcer la cohésion des territoires qui la composent.

 

(1) Dalo : droit au logement opposable
(2) Daho : droit à l’hébergement opposable

 

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