JGDE. La Bretagne figure régulièrement en haut des classements des destinations touristiques. Quel est le poids économique et social du secteur pour la région ?
Anne Gallo. Avec 12,8 millions de touristes accueillis en 2016 pour 96,4 millions de nuitées, la Bretagne est l’une des principales destinations touristiques françaises. Le tourisme représente 8,1% du PIB et 57 600 emplois directs et indirects, soit 4,8% de l’emploi régional.
JGDE. Vous présidez le Comité Régional du Tourisme (CRT). Pouvez-vous nous présenter ses missions et son mode de gouvernance ?
AG. Le CRT Bretagne est un outil de développement et de promotion du tourisme régional. Organisme fédérateur pour l’ensemble des acteurs du tourisme de la région, il est financé par le Conseil régional pour déployer la stratégie touristique et « affirmer la Bretagne comme une destination touristique d’exception ». Ses statuts associatifs assurent une gouvernance partagée entre les acteurs institutionnels et leurs opérateurs d’une part, les acteurs privés et associatifs d’autre part.
JGDE. Vous êtes également vice-présidente du Conseil régional chargée du tourisme, du patrimoine et des voies navigables. Quelles sont les complémentarités entre ces trois domaines ?
AG. Pour conduire les objectifs de repositionnement et de reconquête touristique que vise le Conseil régional, il a paru nécessaire d’associer les services du tourisme, de la valorisation du patrimoine, de l’inventaire du patrimoine et des voies navigables. Cela permet de mieux organiser la synergie des politiques patrimoniales et touristiques, de repositionner et de relancer les politiques du patrimoine et des voies navigables et de faire converger les intérêts des différents acteurs. L’objectif final est d’asseoir une attractivité touristique renouvelée.
Le tourisme prend appui et s’enrichit de l’identité de la Bretagne, de ce qui fait l’art de vivre ensemble, de ses paysages, de ses voies d’eau, de son patrimoine, de sa créativité artistique. La Bretagne reste ainsi l’une des régions les plus attractives en accueillant près de 20 000 nouveaux habitants par an. C’est évidemment un défi majeur, mais surtout un facteur d’enrichissement et d’activité économique.
Nos politiques régionales du tourisme, du patrimoine et des voies navigables permettent enfin aux Bretons eux-mêmes de découvrir et de faire découvrir les richesses de leur région. Ils peuvent participer, à leur mesure, à leur préservation, en enrichissant l’art de vivre et la sociabilité régionale.
JGDE. La Région a renouvelé sa stratégie touristique en identifiant 10 destinations. Comment s’est opéré ce choix ?
AG. La Bretagne avait besoin d’une organisation nouvelle et adaptée pour gagner en lisibilité et en performance, intégrant l’évolution des besoins des clientèles et des prestataires, le tout au service d’une meilleure efficacité économique.
La Stratégie touristique des Destinations, proposée par la Région en 2012, est issue de l’étude MORGOAT 2005 qui a mis en évidence 10 grandes Destinations et zones de flux. Il s’agit d’univers géographiques distincts, avec leur attrait propre.
Les 10 Destinations touristiques constituent le cœur du contrat de Destination Bretagne lancé par le ministère des Affaires étrangères, qui fait de la Bretagne l’une des 22 marques françaises promues à l’international. Ce sont des territoires de projets qui, dans une approche partenariale « publique – privée », soutiennent des stratégies intégrées de développement et de diversification touristique.
Elles sont de fait la maille locale de structuration et de développement touristique et les EPCI ont un rôle central à jouer.
JGDE. La clientèle européenne et internationale est très importante. Quels sont les outils de promotion que vous déployez pour la capter et la fidéliser ?
AG. Il nous semble essentiel, dans la conjoncture actuelle, de conforter nos actions de valorisation sur les traditionnels marchés européens de proximité et d’aborder les marchés lointains à fort potentiel.
Quatre approches sont utilisées sur les marchés de proximité : les campagnes d’image ; les campagnes tactiques, en soutien des liaisons aériennes ou maritimes ; les partenariats avec des territoires voisins ; le travail auprès des réseaux de distribution et des tour-opérateurs.
Pour les marchés lointains, soit nous nous inscrivons dans le cadre de partenariats économiques globaux, par exemple sur le marché australien où les actions s’inscrivent dans le cadre d’un accord intergouvernemental France – Australie, soit nous nous intégrons dans des opérations globales de promotion de la France. C’est le cas sur les marchés chinois, canadien et américain.
JGDE. Un récent rapport du CESER pointait les possibles conséquences du Brexit sur l’économie bretonne. Avec plus de 600 000 visiteurs britanniques par an, le tourisme semblait particulièrement impacté…
AG. Les Britanniques constituent la principale clientèle touristique étrangère de notre pays. En Bretagne, c’est une clientèle essentielle, avec 635 000 touristes pour 5,6 millions de nuitées, soit 35% de la clientèle étrangère bretonne.
Immédiatement après le vote du 23 juin 2016, la question du tourisme est apparue comme une préoccupation majeure. L’issue des négociations est incertaine et il est difficile d’imaginer l’impact économique global. Nous estimons toutefois qu’à long terme, la clientèle britannique restera la principale clientèle étrangère de la région. Il est donc pour nous primordial de maintenir les efforts pour l’attirer, d’autant que, nous constatons depuis plusieurs années une baisse de cette clientèle en France. C’est une tendance plus préoccupante que le Brexit, qui nous oblige à nous réinterroger sur notre offre.