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Direction régionale de l’agriculture de Rabat-Salé-Kénitra

« La région a des expériences très réussies d’agriculture solidaire qui démontrent son impact positif sur l’amélioration des conditions de vie de nos populations ».

A la direction de l’Office régional de mise en valeur agricole (ORMVA) du Gharb et à la Direction régionale de l’agriculture de Rabat-Salé-Kénitra, M. El Mahdi ARRIFI décrypte le modèle agricole, ses atouts, ses difficultés ainsi que les premières conséquences des changements climatiques qui s’annoncent.

Pouvez-vous nous présenter les missions et compétences de l’Office régional de mise en valeur agricole du Gharb que vous dirigez ?

L’Office régional de mise en valeur agricole (ORMVAG) est un établissement public qui est doté de l’autonomie financière et de la personnalité morale. Il est sous la tutelle du ministère de l’Agriculture mais également sous la tutelle financière du ministère de l’Économie et des Finances. C’est un organisme qui a été créé en 1966 pour gérer le grand périmètre du Gharb qui fait plus de 380 000 hectares de terrains, avec un haut potentiel de production. L’irrigation est faite par de grands barrages. L’Office est investi de trois grandes missions : la première est de créer les aménagements fonciers et hydrauliques qui concourent à l’amélioration de la productivité agricole. Sa deuxième mission, concerne la gestion de l’irrigation, en assurant l’exploitation et la maintenance des réseaux d’irrigation et de drainage mais aussi la distribution de l’eau aux exploitants agricoles. Enfin, sa troisième mission est le développement agricole avec l’accompagnement des exploitants, la réalisation d’études et de statistiques agricoles et l’exécution de projets qui portent sur les filières de production végétale et animale. Depuis sa création, de nombreux aménagements ont donc ainsi été réalisés.

Les potentialités agricoles de la région de Rabat Salé Kénitra en chiffres :

  • Superficie totale de 1,7 millions d’hectares;
  • 20 % des ressources en eau du pays ;
  • Superficie de « grande irrigation » qui dépasse 115 000 hectares ;
  • Des ressources en eau souterraines de près d’1 milliard de m3;
  • Une grande diversité de cultures : fruits, agrumes, oliviers, fruites rouges, maraichage, céréales, légumineuses, cultures sucrières, riz, fourrages et même des cultures tropicales, etc. ;
  • En terme de production animale : plus de 700 000 têtes de bovins et plus de 2, 1 millions de têtes d’ovins ;

 

Avec toutes ces productions, notre région est aujourd’hui en première des régions agricoles du pays à côté de la région de Casablanca. Notre contribution régionale au PIB nationale en matière agricole est de 15% en 2016. Il y a donc un potentiel important que nous sommes bien sûr toujours en train de valoriser. Il y a encore des possibilités de développement notamment dans le cadre du « Plan Maroc vert ». En termes économique et financier, l’Office a plusieurs sources de financement. La première provient du budget général de l’État près de 97 % de financement de la part du ministère de l’Agriculture. La seconde, qui assure la totalité de nos dépenses de fonctionnement, provient des redevances sur l’eau payées par les exploitants agricoles sans avoir recours aux subventions de l’État. La totalité des fonds étatiques sert à l’investissement dans les projets.

Le gouvernement marocain, a lancé en avril 2008 le « Plan Maroc Vert » où en sommes nous dans la région ?

Cette stratégie « Plan Maroc Vert » (PMV) est née grâce à la forte volonté de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, cette politique nationale est déclinée par des plans agricoles régionaux. Notre région a donc son propre plan et c’est un des plus importants au niveau national. Notre plan repose sur le développement d’une agriculture à haute valeur ajoutée, dans le périmètre de « grande irrigation » et sur un programme d’agriculture solidaire pour les zones précaires orienté vers les petits agriculteurs pour favoriser la reconversion vers des cultures plus porteuses.

Notre plan, fait appel à la mobilisation d’investissement privé mais également public dans les filières porteuses végétales et animales. Pour cela, nous avons un programme d’investissement approchant 19 milliards de dirhams (soit près de 2 milliards d’euros) sur la période du PMV (2008-2020).
La réalisation des projets se fait évidemment avec les partenaires privés, donc des investisseurs organisés notamment dans le cadre des « interprofessions » depuis 2012 pour structurer chaque filière de l’amont à l’aval de la production jusqu’à la transformation en incluant tous les acteurs : du producteurs à l’exportateurs. Ces partenariats peuvent aussi être structurés sous forme d’agrégats qui permettent aujourd’hui de rassembler des producteurs qu’ils soient petits, moyens ou grands, autour d’une même filière agricole et donner l’opportunité aux petits ou moyens agriculteurs d’accéder au financement à travers les garanties données par l’agrégateur. Depuis sa mise en œuvre en 2008, le PMV a pu se développer grâce à ces systèmes mutualisés d’investissement. Les investisseurs étrangers, comme les espagnols pour les fruits rouges par exemple, nous apportent également un de transfert de compétences et jouent un rôle de levier auprès des petites exploitations.

Quels sont les grands projets à horizon 2020, sur le PMV et concernant la reconversion pour l’irrigation, les réseaux d’irrigation et les stations de pompage ?

Nos projets et chantiers actuels en matière d’eau d’irrigation sont transversaux et ambitieux pour un investissement très élevé de 25 milliards de dirhams (2,5 milliards d’euros). Cela concerne trois axes principaux. D’abord, il s’agit de l’extension du périmètre d’irrigation car il est possible de développer davantage l’accès aux ressources en eau disponibles. Le deuxième axe est relatif à la reconversion des réseaux pour de l’irrigation économe en eau. Enfin, le troisième et dernier axe concerne l’amélioration du réseau de distribution d’eau, la mise au niveau du réseau d’assainissement des eaux agricoles et le désenclavement du monde agricole avec la valorisation de la production et de nouvelles unités de conditionnement. D’ailleurs nous avons pu à ce titre bénéficier de financement européen. Par exemple, le premier des grands projets que nous avons réalisé a concerné la reconversion de 10 000 ha d’un système d’irrigation peu efficient que nous avons reconvertis sur de l’irrigation au goutte-à-goutte et ce avec le concours de la Banque européenne d’investissement qui a financé à 50 % ce programme. C’est un projet aujourd’hui très réussi, qui est pris en modèle et qui fait l’objet de nombreuses visites. En effet, nous avons mis en place un système d’irrigation moderne piloté par les nouvelles techniques d’avertissement à l’irrigation et intégrant le volet de mise en valeur agricole dans l’objectif d’améliorer la productivité et de diversifier les cultures , pour plus d’économie et une meilleure valorisation ainsi que pour faire face aux effets du changement climatique.

 

Quels sont aujourd’hui les progrès réalisés dans les domaines de l’amélioration de la croissance agricole, de la lutte contre la pauvreté et la faim, l’intégration des jeunes mais aussi en termes de résilience de l’agriculture ?

On parle beaucoup de progrès au Maroc et cela reste nécessaire. Sur le plan humain, le secteur agricole est bien entendu prioritaire. Le ministre de l’Agriculture a pris conscience, dès le lancement du PMV, de l’importance de former, d’accompagner et d’encadrer les agriculteurs. C’est pourquoi, il a été mis en place une structure à l’échelle nationale très imposante dédiée au conseil agricole et à l’accompagnement. C’est l’Office National du Conseil Agricole qui possède des directions régionales et des services provinciaux du conseil agricole au niveau de tout le territoire national, cet Office est chargé d’assurer un conseil de proximité sur tous les plans, que ce soit technique, de gestion, de besoin en formation, d’accompagnement au changement, etc…

Depuis plus de huit ans de mise en œuvre du PMV, la région a des expériences très réussies d’agriculture solidaire qui démontrent son impact positif sur l’amélioration des conditions de vie de nos populations et de lutte contre la précarité. Enfin, la formation professionnelle agricole compte aussi beaucoup pour le progrès du secteur. Nous disposons d’établissements de formation professionnelle pour former des techniciens spécialisés, des techniciens, des ouvriers qualifiés dans différents disciplines, comme l’horticulture, l’élevage, la mécanisation, l’irrigation, etc.. Nous assurons aussi la formation par apprentissage surtout pour les fils d’agriculteurs, 3000 bénéficiaires sont attendus à l’horizon 2020, cela va permettre d’améliorer le niveau des petites exploitations. L’effet se fait déjà sentir, de nombreux jeunes font « bouger » le système actuellement !

 

 

En termes de résilience, beaucoup d’efforts se font. Nous sommes fortement conscients des conséquences des changements climatiques : le Maroc se situe au carrefour des changements climatiques entre l’Europe, l’Afrique et l’océan Atlantique, la Méditerranée. Nous faisons face de plus en plus à des phénomènes climatiques extrêmes : des sécheresses prononcées comme en 2015-2016, des inondations très importantes comme en 2009-2010. Nous sommes donc dans une perspective d’adaptation de nos cultures, en rationnalisant nos ressources, afin d’appréhender et nous adapter aux changements climatiques. D’ailleurs, le Maroc est le seul pays au Monde actuellement qui subventionne à 100 % les projets d’économie d’eau.

Quel message souhaitez- vous faire passer à notre lectorat ?

Le partenariat historique du Maroc avec l’Union européenne dans le domaine de l’agriculture est un point pour nous essentiel. Les investisseurs européens sont donc les bienvenus au Maroc pour participer à notre développement. Le savoir-faire des entreprises européennes est le bienvenu dans le domaine de l’irrigation, de l’aménagement de l’espace agricole, des aménagements hydrauliques. Et surtout, nous prenons très au sérieux la dimension du changement climatique que nous intégrons dans chaque action, dans chaque projet ; l’objectif étant de sauvegarder les ressources naturelles et surtout d’augmenter la résilience de l’agriculteur et de l’agriculture en général.

 

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