L’Etat mais aussi les collectivités territoriales et locales, les entreprises, l’économie sociale et la société civile ont investi le champ de la transition énergétique.
Entretien avec Michel COLOMBIER,
Président du Comité d’experts pour la transition énergétique,
Directeur scientifique de l’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI)
Quels sont à vos yeux les principaux défis liés à la transition énergétique ?
Avec le débat national sur la transition, puis la LTECV, la France a réaffirmé une position qu’elle défend avec constance au niveau européen : pour engranger les bénéfices économiques, sociaux et industriels de la transition, il faut un pilotage public fort et stratégique, permettant aux acteurs d’anticiper et de s’organiser dans le respect de leurs rôles respectifs. Cette approche doit maintenant être confirmée sur la durée, dans la mise en œuvre de la transition.
Au-delà du secteur électrique, sur lequel la Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE) n’apporte pas suffisamment de cadrage, le secteur des transports me semble encore trop négligé : pourtant, les enjeux sociaux, environnementaux bien sûr, mais aussi industriels sont colossaux.
L’autre sujet est celui des politiques concrètes : nous consacrons beaucoup d’énergie à fixer des objectifs, moins à évaluer nos instruments de mise en œuvre et à les réformer le cas échéant : c’est cependant une priorité, notamment pour engager le programme de rénovation du parc bâti à coût maîtrisé.
Enfin, il me paraît essentiel de mieux inscrire la transition dans son cadre européen et international : les règles de marché, les régulations environnementales, les paradigmes technologiques de demain se négocient à ces échelles.
Peut-on faire un premier bilan de l’application de la loi de transition énergétique pour la croissance verte d’août 2015 ?
Je crois qu’il est trop tôt pour tirer un bilan substantiel. Mais pour moi, la première caractéristique de cette loi (et plus largement des évolutions de ces dernières années) se situe moins sur le plan des objectifs que sur celui de la gouvernance ; de ce point de vue, la transition énergétique est réellement engagée et prise en charge par une multitude d’acteurs, bien au-delà de l’Etat : collectivités territoriales et locales, entreprises, économie sociale et société civile sont en mouvement.
De quelle façon l’Institut du développement durable et des relations internationales (IDDRI) intervient-il pour favoriser cette prise de conscience ?
Nous produisons tout d’abord un certain nombre de travaux d’analyse et d’évaluation des processus en cours, que nous mettons ensuite en discussion dans différents cadres. Nous attachons une importance toute particulière à suivre les transitions énergétiques de nos voisins européens, mais aussi plus largement des pays du G20 grâce à notre réseau de partenaires internationaux et d’en tirer les enseignements ou les perspectives utiles à la réflexion des acteurs français.
Nous travaillons également en étroit partenariat avec ces acteurs à explorer les voies possibles de la transition, au niveau sectoriel : récemment, nous avons ainsi travaillé sur les questions d’intégration des énergies renouvelables, l’évolution de la demande électrique, les impacts des nouvelles mobilités (autopartage, covoiturage, véhicules autonomes etc.) ou les solutions innovantes de financement de la transition.