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La France leader de la Transition énergétique en Europe, un “marathon” complexe pour atteindre ses objectifs climatiques d’ici 2050.

Fatih Birol, Directeur Exécutif de l’Agence Internationale de l’Energie (IEA)

Je mets en lumière un rapport publié par l’Agence internationale de l’énergie (AIE) qui appelle le gouvernement à accélérer les investissements dans les énergies propres. Et l’invite à prendre des décisions rapides sur l’avenir du nucléaire.

C’est un paradoxe douloureux, mis en avant par l’Agence internationale de l’énergie (AIE). La France s’est posée comme l’un des leaders de la transition énergétique et elle est largement vue comme un précurseur par la communauté internationale. De fait, ses émissions de gaz à effet de serre par habitant sont les plus faibles des pays membres du G7. Pourtant, elle est en retard sur ses objectifs de transition énergétique, bien que d’importantes réformes soient en cours.

Un travail considérable

A ce stade, la France n’est pas dans les clous pour atteindre la neutralité carbone en 2050. En 2021, par exemple, les objectifs visés en matière de renouvelables et d’efficacité énergétique n’ont pas été atteints. La France a un travail considérable devant elle sur la route du net zéro.

Les émissions de CO2 du secteur de l’électricité sont relativement faibles, grâce au nucléaire, qui assure 71 % des besoins, et dans une moindre mesure à l’hydroélectricité (10 %). Mais le reste des usages énergétiques est dominé par les carburants fossiles comme le pétrole et le gaz, dans le secteur du transport notamment. Le pays va probablement avoir des difficultés à atteindre ses objectifs de déploiement de véhicules électriques.

La France revendique un rôle moteur en faveur de la transition énergétique sur la scène internationale et dispose déjà d’une électricité très largement bas carbone… mais elle doit progresser davantage pour espérer parvenir à la neutralité carbone en 2050. A deux mois de l’élection présidentielle, l’Agence internationale de l’énergie (AIE), basée à Paris et rattachée à l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), dresse le bilan de la politique énergétique du pays – un exercice qu’elle répète tous les cinq ans. En plein débat sur les différentes options possibles et alors que le président Emmanuel Macron a annoncé, son intention de relancer un nouveau programme nucléaire, elle formule également une série de recommandations et appelle les dirigeants à faire des choix de façon urgente.

Des décisions-clés concernant le futur système énergétique de la France doivent être prises bientôt si elle veut pouvoir atteindre zéro émission nette en 2050. La France doit investir beaucoup plus dans l’efficacité énergétique, les énergies renouvelables et le nucléaire.

Trop de pétrole et de gaz

Cela se traduit par une hausse continue des émissions de gaz à effet de serre, hormis en 2020, non représentative en raison de la crise sanitaire. La France consomme actuellement 145 millions de tonnes équivalent pétrole tous les ans, beaucoup trop par rapport à l’objectif de 130 millions qui avait été fixé pour 2020, et de 121 millions prévus en 2030.

Car nous faisons d’abord un constat : les progrès de la France sont lents et le pays est en retard sur ses propres objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de déploiement des renouvelables. Celles-ci ne représentaient que 19,1 % de la consommation finale d’énergie en 2020, alors que l’ambition était d’atteindre 23 %. Pour l’organisation, l’écart avec les cibles inscrites dans la feuille de route énergétique de la France pour 2023 – la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) est encore poussif : pour les atteindre, la France devrait ajouter, en à peine trois ans, 6,4 gigawatts (GW) de capacité éolienne, soit 40 % de la capacité totale installée aujourd’hui, et quasiment doubler ses capacités photovoltaïques.

L’Hexagone devrait pouvoir rattraper son retard au cours des prochaines années, si les réformes importantes qui sont en cours sont mises en œuvre. Il faudra en particulier une accélération significative des investissements dans les énergies propres, et dès maintenant. Pour atteindre les objectifs fixés pour 2023, il faudrait ajouter plus de 6 gigawatts de capacités éoliennes (l’équivalent de 40 % de ce qui est déjà installé) et presque doubler les capacités solaires, en seulement trois ans. Un véritable défi.

Accélérer dans les renouvelables

Nous saluons certaines réformes pour accélérer le déploiement des renouvelables, comme les mesures du plan de relance (30 milliards d’euros pour la transition) ou le dispositif ‘’MaPrimeRénov’’’, pour la rénovation énergétique des bâtiments. Mais nous regrettons d’autres, comme la révision rétroactive des tarifs accordés aux fournisseurs d’électricité solaire, une mesure qui sape la confiance des investisseurs selon elle.

La planète n’investit pas assez pour contrer le réchauffement climatique

La France reste significativement en retard sur ses voisins dans l’éolien en mer, aucune turbine n’ayant été installée à ce jour au large des côtes. Les aides publiques aux renouvelables, comme aux mesures d’efficacité énergétique d’ailleurs, sont complexes, multiples et fragmentées.

Nucléaire : l’urgence

Le retard dans les renouvelables n’est pas le seul problème pointé dans notre rapport. Le parc nucléaire français est vieillissant. Or aucune décision n’a été prise sur ce sujet, faute de visibilité sur la politique énergétique au-delà de 2035, date à laquelle la part du nucléaire doit tomber en principe à 50 % du mix électrique. Il est urgent que le gouvernement décide comment seront financées la modernisation du parc nucléaire existant et la construction de nouvelles centrales. Emmanuel Macron doit répondre à cet appel.

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