Les grandes compagnies pétrolières se battent pour des combustibles fossiles propres. Plusieurs grandes compagnies pétrolières internationales prévoient d’augmenter leur production tout en promettant de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre au cours de la prochaine décennie et au-delà. Cette stratégie, apparemment contraire à la logique, est le résultat de la pression exercée par les organisations internationales pour la décarbonation et l’augmentation continue de la demande énergétique dans le monde.
Royal Dutch Shell, Eni, Total Énergies, Exxon et Repsol sont quelques-unes des grandes entreprises qui ont promis des objectifs d’émissions nettes de carbone zéro pour 2050.
Cependant, les sociétés pétrolières et gazières ont des approches variées pour atteindre cet objectif, certaines adoptant le pétrole à faible teneur en carbone et d’autres déplaçant leurs opérations vers les énergies renouvelables.
Repsol, par exemple, a augmenté son allocation d’investissement pour des projets bas carbone d’environ 1,13 milliard de dollars, avec l’objectif de produire 60 % d’électricité renouvelable d’ici 2025. D’autres entreprises prévoient d’augmenter leur production de gaz naturel comme « le pont évident » pour la transition énergétique. Pour ce faire, Shell étend son marché du GNL et de la pétrochimie, et investit dans les développements de biocarburants et d’hydrogène vert.
Exxon est très optimiste quant aux changements qu’il apporte, car il prévoit de doubler ses bénéfices d’ici 2027, tout en réduisant ses émissions.Exxon a déclaré qu’il investira 15 milliards de dollars dans des technologies de réduction des émissions, visant à nettoyer les opérations existantes en utilisant la technologie de capture et de stockage du carbone et d’autres innovations.
Malgré la pression des chefs de gouvernement, les compagnies pétrolières et gazières de nombreux pays se rebellent alors que la demande mondiale d’énergie continue d’augmenter. Au Canada, des entreprises comme Canadian Natural Resources, Cenovus Energy, Suncor Energy et Imperial Oil prévoient de réduire les émissions, mais pas la production. Plusieurs acteurs espèrent y parvenir en incorporant de nouvelles techniques innovantes aux opérations existantes, comme l’utilisation de l’énergie géothermique dans la production de pétrole brut à partir des sables bitumineux.
Les majors pétrolières du monde entier parient sur un pétrole à faible teneur en carbone plutôt que de passer directement à des alternatives renouvelables. Alors que les majors pétrolières soutiennent que les opérations d’énergie renouvelable ne peuvent pas répondre à la demande énergétique mondiale croissante d’aujourd’hui, plusieurs ont du mal à maintenir les opérations pétrolières de manière plus respectueuse de l’environnement. Presque toutes les grandes compagnies pétrolières du monde ont annoncé des investissements dans la technologie CSC, une décision qui, pourrait fournir le financement nécessaire pour étendre les opérations et limiter les impacts du réchauffement climatique.
D’autres compagnies pétrolières améliorent les méthodes de raffinage du pétrole en produits pétrochimiques, qui devraient continuer d’être en forte demande à mesure que les besoins en brut diminuent.
Le chinois Sinopec, par exemple, a développé une technologie de vapocraquage pour convertir le pétrole directement en produits pétrochimiques comme l’éthylène et le propylène.
La société norvégienne Equinor, avec d’autres multinationales, a déplacé sa production de pétrole des zones d’exploitation à haute teneur en carbone vers des endroits où elle peut plus facilement pomper du pétrole à faible teneur en carbone.
Ce type de mesures pourrait permettre aux majors pétrolières de continuer à pomper du pétrole à un rythme élevé et de maintenir leurs engagements de réduction d’émissions. Pourtant, certains experts en énergie accusent encore une fois ‘’Big Oil’’ de ‘’greenwashing’’, suggérant qu’ils ne peuvent pas simplement avoir le beurre et l’argent du beurre.
Des organisations environnementales ont récemment accusé la banque d’investissement JPMorgan de soutenir Big Oil pour réduire leur intensité carbone, mais pas nécessairement leurs niveaux de production, au lieu de soutenir l’objectif des communautés internationales d’agir contre le changement climatique. Plusieurs banques soutiennent l’objectif des compagnies pétrolières de réduire l’intensité de carbone de leur pétrole, plutôt que la quantité de brut qu’ils produisent, qui, selon les environnementalistes, continue d’avoir un impact négatif sur la planète.
Certaines compagnies pétrolières, notamment en Europe, tentent de trouver un équilibre entre la transition vers des alternatives renouvelables et le maintien de leur production de pétrole à faible émission de carbone alors que la demande se poursuit. BP, en particulier, salue la transition avec des plans pour décupler ses investissements dans les entreprises à faibles émissions, soit quelque 5 milliards de dollars par an.
Cependant, les géants américains Chevron et Exxon ne semblent pas avoir l’intention d’abandonner le pétrole alors qu’ils continuent d’étendre leurs opérations pétrolières dans le monde.
Mais si Big Oil atteint une production à faible émission de carbone alors que la demande reste élevée et que les énergies renouvelables ne sont pas encore prêtes à fournir l’énergie mondiale, cela peut-il être considéré comme un greenwash ? Les grandes compagnies pétrolières devront convaincre le monde au cours de la prochaine décennie, tout en continuant à pomper des quantités massives de brut, que le pétrole à faible teneur en carbone réduit les émissions de gaz à effet de serre sans causer de dommages excessifs à l’environnement. Et que comme le reste du monde, elles souhaitent effectuer la transition vers des alternatives vertes.