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Secteur financier, consommateurs et entreprises dans le cadre des mesures d’allégement COVID-19

Valdis DOMBROVSKIS, Vice-Président exécutif pour l'économie au servcie des personnes et commissaire au services financiers

Alors que de nombreux pays européens assouplissent soigneusement leurs mesures de confinement, il y a des lueurs d’optimisme qui laissent penser que le pire de la crise pourrait bientôt être derrière nous.

Cependant, la pandémie est loin d’être terminée.

Par nécessité, nous avons encore des restrictions dans notre vie privée et professionnelle pour contenir la propagation du virus. L’activité économique reste limitée.

Les prochaines semaines et les prochains mois seront critiques pour les petites entreprises en particulier, sans parler des particuliers et des consommateurs en général.

Nombre d’entre eux sont en proie à la maladie, au chômage et à une baisse de revenus.

La plupart des entreprises sont confrontées à des perturbations dans les chaînes d’approvisionnement, à des fermetures temporaires et à une demande plus faible. Celles qui n’ont pas de revenus, ou très peu, sont déjà incapables de faire face à leurs obligations de paiement.

En outre, de nombreux consommateurs éprouvent des difficultés à rembourser leurs prêts hypothécaires et autres.
S’ils ne peuvent pas payer une prime d’assurance, par exemple, ils risquent de perdre toute couverture.
Cela vaut aussi pour les entreprises. Alors qu’elles pouvaient supposer qu’elles étaient couvertes pour les pertes liées au virus, leur couverture peut se révéler insuffisante.

Les mesures de saisie prises sur les biens des particuliers et des entreprises pourraient entraîner des dommages durables, suite à des tensions de liquidité qui sont, en fait, temporaires. Et les dommages à long terme sont ce que nous devons vraiment éviter pour notre reprise économique générale.

Il est dans notre intérêt à tous – y compris dans celui du secteur financier – que les consommateurs et les entreprises traversent cette période difficile avant que la reprise ne s’amorce véritablement.
Depuis longtemps, nous disons qu’il est vital de maintenir le flux de crédit vers l’économie réelle, pour s’assurer que suffisamment de liquidités sont en place pour ceux qui en ont besoin.

Les institutions financières et les autorités publiques nationales de toute l’UE ont mis en place une série de mesures pour fournir ces liquidités, notamment des moratoires sur le paiement des obligations de crédit, aux consommateurs et aux entreprises.

Pour les particuliers surtout, cela devrait les aider à éviter les saisies immobilières que j’ai mentionnées précédemment.

Le paquet bancaire que la Commission européenne a présenté en avril contribue à clarifier le traitement réglementaire de ces mesures et d’autres encore.

Il encourage les banques à exploiter toute la souplesse des règles prudentielles et comptables de l’UE afin de maintenir la fluidité des liquidités. De plus, il prévoit des mesures d’allégement supplémentaires pour soutenir les prêts à l’économie réelle.

Je tiens à remercier les représentants du secteur financier présents ici aujourd’hui pour tous les efforts que vous avez déployés à cet égard.

Malheureusement, tout n’a pas été simple.

C’est pourquoi nous nous réunissons maintenant : pour trouver des moyens de résoudre les problèmes très réels auxquels sont confrontés les entreprises et les particuliers.

Nous proposons une discussion pratique entre les institutions financières et leurs clients sur ce que le secteur privé peut faire dans ces circonstances particulières – au-delà des mesures publiques déjà en place.
Et je me félicite de la récente déclaration commune des petites et moyennes entreprises et des banques, qui contient des recommandations pour améliorer les flux de crédit aux PME.

Pour commencer, nous constatons que les mesures prises dans l’UE varient considérablement d’un pays à l’autre.
Il existe des mesures volontaires prises par l’ensemble du secteur ou seulement par certaines institutions. Dans certains cas, tous les consommateurs et entreprises touchés peuvent en bénéficier. Dans d’autres, les critères d’éligibilité sont stricts et l’accès peut être un processus long.

Le premier objectif de la table ronde d’aujourd’hui est donc de partager les meilleures pratiques dans ce domaine – et d’éviter toute fragmentation dommageable.

Nous avons besoin d’un effort collectif et cohérent au niveau européen pour apporter une aide aux entreprises et aux particuliers.

Il existe des différences substantielles dans la durée de la période pour laquelle les régimes de report de paiement sont accordés et dans la détermination de la personne qui en supporte le coût final. Les caractéristiques des régimes varient également : par exemple, le fait que le report de paiement soit ou non sans intérêt.

Cela dit, la Commission accueille très favorablement ces programmes dans les secteurs bancaire et non bancaire. Les consommateurs et les petites entreprises des secteurs les plus touchés en font déjà bon usage.

Mais il est important de s’assurer que ces systèmes ne causent pas de préjudice, par exemple en modifiant les conditions contractuelles au détriment des emprunteurs.

Cela signifie qu’il n’y aura pas de hausse des taux d’intérêt ou des primes à l’avenir.

Pas de frais cachés, pas d’autres frais supplémentaires et, dans la mesure du possible, pas d’exigences excessives en matière de garantie.

Il est tout aussi important que ces programmes offrent un accès approprié au crédit, en particulier pour les petites et moyennes entreprises. Il en va de même pour les prêts non bancaires, et en particulier pour le crédit-bail.

Cela m’amène au deuxième objectif d’aujourd’hui : veiller à ce que les régimes soient mis en œuvre efficacement et au moment opportun pour ceux qui en ont le plus besoin.

Ces principes d’équité devraient également s’appliquer aux régimes similaires proposés par le secteur de l’assurance.

J’y reviendrai un peu plus tard.

Je voudrais mentionner quelques autres mesures, telles que les garanties de crédit et les systèmes de financement subventionnés.

Bien que la plupart de ces projets soient soutenus par des fonds publics, les banques jouent un rôle important en veillant à leur efficacité.

Elles doivent faire profiter les emprunteurs des avantages de la garantie publique et du financement subventionné.
Nous avons conçu le paquet bancaire pour faciliter l’octroi de prêts par les banques, ce qui constitue déjà un grand pas en avant. Ce paquet accorde un allègement prudentiel aux banques afin qu’elles puissent utiliser les capitaux et les liquidités libérés pour canaliser les fonds vers les entreprises et les particuliers directement touchés par la pandémie.

En raison des difficultés que rencontrent actuellement les emprunteurs, ces liquidités supplémentaires leur seraient autrement inaccessibles.

Toutefois, les banques ne doivent pas réduire ou subventionner de manière croisée les prêts à d’autres entreprises, ni utiliser les garanties pour financer des entreprises sans contraintes financières.

Enfin, tout ce bon travail et ces efforts ne doivent pas se perdre dans la bureaucratie. Ils doivent atteindre les entreprises et les consommateurs dans la pratique et sur le terrain.

Passons au secteur des assurances :

Les assureurs ont également travaillé dur pour maintenir un service normal et aider leurs assurés pendant cette crise. Ils proposent de nombreuses initiatives et programmes volontaires similaires aux moratoires sur les prêts.
Il s’agit notamment d’ajuster ou de suspendre les primes et les cotisations, de prolonger ou d’annuler le paiement des primes et de passer d’un tarif à l’autre.

En signe de bonne volonté, il y a parfois une compensation allant en dessous du strict minimum contractuel.
La cessation d’activité est un domaine particulièrement sensible. Dans ce domaine, les conditions contractuelles – et leur interprétation – varient selon les assureurs.

Certains assureurs sont obligés d’indemniser les assurés – par exemple les petites entreprises telles que les restaurants – pour avoir dû fermer leurs portes en raison de la pandémie.

D’autres assurés peuvent ne recevoir aucune indemnisation.

Il n’est donc pas surprenant que les petites entreprises titulaires de ce type de couverture soient frustrées par leur situation inégale.

Cela a conduit à des litiges dans certains cas, à l’intervention des autorités publiques pour assurer un certain degré de coordination.

Il est important de trouver un équilibre entre le soutien aux entreprises et aux particuliers, le respect des contrats et la protection de la solidité financière du secteur de l’assurance.

À l’avenir, nous devrons également réfléchir à la meilleure façon dont le secteur des assurances peut couvrir les risques de pandémie.

Certaines idées ont déjà été émises et la Commission est prête à s’engager pleinement dans ces discussions.
Il y a donc matière à réflexion. Pour la réunion d’aujourd’hui, j’aimerais mieux comprendre comment toutes ces différentes mesures ont fonctionné en pratique.

J’aimerais également discuter de la manière dont nous pourrions aborder la nécessité de prêter de manière plus systématique.

Les initiatives volontaires et nationales sont souvent à l’origine de situations inégales dans lesquelles les consommateurs ou les entreprises peuvent être traités différemment les uns des autres.

Mais en particulier, je voudrais poser ces questions :

  • Les mesures sont-elles suffisamment efficaces et ciblées pour aider ceux qui sont réellement dans le besoin ?
  • Les différences entre les mesures nationales des différents pays de l’UE sont-elles justifiées ? Ou même celles entre les différentes entreprises ?
  • Les consommateurs et les entreprises peuvent-ils y accéder sans trop de formalités administratives ?
  • Qu’est-ce qui peut être amélioré, quelles autres initiatives du secteur financier pourraient être utiles ?Ce n’est pas une chose que nous devrions suranalyser.

L’essentiel est de soutenir l’économie européenne, d’aider les entreprises, quelle que soit leur taille, et leurs travailleurs à traverser cette crise.

Et nous pouvons y parvenir ensemble, en continuant à faire circuler les liquidités de la manière la plus efficace possible vers ceux qui en ont besoin. Je vous remercie et vous souhaite un échange utile et fructueux.

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