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Blanchiment d’argent et financement du terrorisme : Des règles européennes plus strictes

Interview de Judith Sargentini et de Krišjānis Kariņš

Afin d’accroître la transparence et de réagir aux derniers développements technologiques, l’UE met à jour sa législation contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

 

La semaine prochaine, le Parlement européen votera sur la 5ème mise à jour de la directive européenne contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. La nouvelle directive devrait empêcher l’utilisation du système financier européen pour le financement d’activités criminelles et renforcer la transparence afin de prévenir la dissimulation de fonds.

Nous avons discuté de ces nouvelles règles avec les auteurs du rapport parlementaire, Krišjānis Kariņš, député démocrate-chrétien letton et Judith Sargentini, députée verte néerlandaise.

 

Plus de transparence

 

Les nouvelles règles offriront plus de transparence concernant la titularité des sociétés et des fiducies.

Avant, les registres de bénéficiaires effectifs n’étaient accessibles qu’à ceux pouvant prouver un « intérêt légitime » de leur divulgation, par exemple les journalistes ou les ONG. À présent, ils seront accessibles à tous.

Les registres seront aussi connectés entre eux afin de faciliter la coopération entre les États membres.

La nouvelle législation inclut aussi des registres des bénéficiaires effectifs de fiducies, accessibles si un « intérêt légitime » est démontré, un registre des comptes bancaires et des coffres forts, accessibles aux autorités publiques. Par exemple : « Si Europol recherche un criminel dans un État membre, ils pourront facilement voir dans quels pays cet individu a des comptes bancaires » explique Krišjānis Kariņš.

« L’objectif est de garder l’argent sale hors du système bancaire européen. Les banques doivent savoir qui se trouve derrière chaque compte. Il y a deux problèmes avec l’argent sale : le premier est qu’il détruit l’économie et le second est qu’il peut servir à financer le terrorisme. » déclare Kariņš.

« Nous avons été clairs, si vous ne voulez pas révéler qui est le propriétaire, il sera compliqué de faire des affaires en Europe » dit Judith Sargentini.

 

Sources du financement du terrorisme

 

« Les sources de financement sont multiples, mais l’argent provient généralement d’activités illégales, du marché noir, des armes, du commerce de biens illégaux, du trafic de personnes. Cet argent pénètre dans le système bancaire européen et est blanchi » déclare Kariņš. Mais Judith Sargentini rappelle que « des actes terroristes peuvent être commis avec des moyens dérisoires, particulièrement en Europe. Louer une voiture, ou même la voler et foncer dans la foule, ça ne coûte rien.»

 

Cartes prépayées et crypto monnaies

 

Le seuil fixé pour identifier les détenteurs de cartes prépayées anonymes a été revu à la baisse, passant de 250€ à 150€. Selon Judith Sargentini, il s’agit d’un changement très important pour les États membres. « Les autorités françaises ont insisté pour que ce changement soit fait car les voitures de location utilisées pour commettre des actes terroristes en France ont été payées grâce à des cartes anonymes. »

Les nouvelles règles imposeront aux plateformes de change de monnaies virtuelles (telles que le bitcoin) et aux fournisseurs de portefeuilles de stockage de vérifier l’identité de leurs clients. « Nous disons maintenant que ces plateformes et que ces fournisseurs de portefeuilles doivent connaître leurs clients, tout comme les banques. C’est plutôt révolutionnaire” explique Sargentini.

Jusqu’à présent, ces règles s’appliquent aux banques, aux notaires, aux casinos, aux marchands d’art. Ces derniers sont obligés de vérifier d’où provient l’argent qu’ils reçoivent.

Comme l’explique Krišjānis Kariņš, les propriétaires de crypto monnaies devront les convertir en euros s’ils souhaitent faire un achat. « C’est au moment où les crypto monnaies entrent dans le système bancaire européen que nous voulons que les banques demandent à leur client qui il est et d’où provident l’argent virtuel » ajoute-t-il.

 

Citoyens et sociétés

 

Le but de cette législation est de neutraliser les financements criminels sans entraver le fonctionnement normal des marchés financiers et des systèmes de paiement tels que les cartes de débit prépayées. « L’objectif est de poser problème aux criminels, pas aux honnêtes citoyens européens » déclare Karinš.

 

Prochaines étapes

 

Le texte final de la directive, qui a déjà été approuvé de manière informelle par le Parlement et par le Conseil en décembre dernier, sera soumis au vote en session plénière le 19 avril. Une fois entré en vigueur, les États membres auront 18 mois pour s’y conformer.

 

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